Christelle, 44 ans, 3 enfants, a témoigné pour la première fois sur En Aparté en 2010. Elle vivait alors à la Martinique, après avoir vécu à Biscarosse, à Brest et en Guyane. Elle nous racontait son lourd combat pour Elio, son troisième enfant, né handicapé moteur cérébral, et son livre « Bonjour de Mahana, des enfants différents » pour faire évoluer le regard sur le handicap.
En juin 2012, Christelle, qui était de retour en métropole depuis bientôt un an, évoquait la douloureuse épreuve qu’elle avait traversée un an auparavant, lorsque son fils Elio avait eu un grave accident neurologique qui a entraîné des séquelles importantes. Elle avait malgré tout repris son travail d’institutrice à mi-temps dans une école de Brest.
Et l’an dernier, en février 2014, Christelle nous parlait de la sortie de son deuxième livre « Parce que c’était toi…parce que c’était nous« , de sa séparation avec le père de ses enfants, de la poursuite de son activité professionnelle à mi-temps et de son engagement dans l’association, Le Petit prince du soleil, qu’elle a créée en 2008 et de son quotidien toujours compliqué entre Elio et ses deux filles. Je lui laisse la parole. Merci Christelle !
Quoi de neuf depuis mon dernier témoignage ?
Une vie pas très facile !
Comme je l’avais annoncé, j’ai repris le boulot à plein temps en septembre 2014. J’en suis ravie, j’ai ma classe pour moi toute seule, je gère comme je veux et c’est très appréciable, même si mes élèves (des CP) sont très dynamiques et bavards. Mais j’adore mon job et je prends beaucoup de plaisir. En revanche, je suis lessivée en rentrant chez moi le soir !
Et c’est là que commence ma deuxième journée, comme beaucoup de mamans : les conduites aux activités de mes filles de 15 et 17 ans ! C’est tous les jours sauf le dimanche et le lundi ! Et j’avoue que c’est lourd, même si leur papa me file un coup de main !
Surtout que dans ce schéma, il y a mon fils Elio, qui est toujours au centre Mathieu Donnart à Brest. Je passe le voir tous les jours ou presque (et quand je suis dans l’impossibilité d’y aller, je culpabilise). J’y vais généralement pendant ma pause déjeuner (mon école est tout près du centre), ou le soir en rentrant du boulot. Je le reprends le week-end à la maison, enfin un week-end sur deux car il va aussi chez son papa.
Parallèlement, je continue à gérer mon asso « Petit prince du soleil ». Moins de « gros » projets cette année mais des projets quand-même, on continue le combat ! L’album de l’asso a vu le jour au mlois de mai 2014, une belle expérience et de belles chansons (« Si c’était toi », disponible auprès de l’asso et en vente au profit des enfants handicapés).
Alors évidemment, mon équilibre vie perso/ vie pro a été modifié avec cette reprise de mon activité à plein temps.
Je suis plus épanouie dans ma vie professionnelle. Comme je le disais, c’est un bonheur de gérer seule ma classe. Je suis très motivée, mais ça ne s’arrête jamais, puisque j’ai du boulot le soir, le week-end, toujours une idée en tête et des recherches à faire. Ça prend beaucoup de temps.
Du coup, j’ai moins de temps pour ma vie perso. Je cavale sans arrêt pour mes enfants car j’essaie de rester le plus disponible possible. Même si je sais qu’à 17 et 15 ans, mes filles sont autonomes, je reste une maman poule, et j’en fait trop. Et de ce fait, je n’ai plus grand temps pour moi. Ce qui n’est pas bien car j’ai tendance à m’oublier. Depuis que je suis séparée de mon mari, c’est un peu le vide autour de moi, je ne sors pas, j’ai tendance à m’isoler. Je sais bien que c’est de ma faute, que c’est à moi de me bouger pour aller vers les autres, mais je manque beaucoup d’énergie en ce moment.
J’aimerais, en plus d’être une enseignante et une maman, être une femme !
Et l’avenir ?
Ouh ! grande question !
Professionnellement, il n’y aura pas de grands changements à moyen terme. Je suis en poste dans cette école et je vais y rester un moment. Plus tard, j’ai toujours dans l’idée de créer une structure pour les enfants handicapés sur Brest, mais c’est un gros chantier et pour le moment, je manque de temps et d’argent…et d’un mécène.
Je continuerai à m’occuper de mon asso, à trouver des projets, à aider les enfants handicapés et leur famille, et le centre Mathieu Donnart à Brest que je parraine.
Et puis, j’ai l’intention de me remettre à l’écriture. J’ai commencé un nouveau livre l’an dernier, qui ne traite pas du handicap cette fois. Un livre de « filles », ou je livre mes petits trucs pour aller « bien », de façon humoristique. Mais voilà des mois que je n’ai pas écrit une ligne, car pour faire de l’humour, il faut aussi aller bien !
Faire des projets d’avenir ? C’est compliqué avec mon fils Elio. Son état moteur n’évolue plus depuis quelques années. Il est là, bien présent, ce qui est super. Mais son état orthopédique se dégrade en grandissant, le dos, les hanches. Cela va devenir de plus en plus compliqué. Il est grand et lourd, et même s’il n’est à la maison que le week-end, je ne sais pas combien de temps j’arriverai encore à m’occuper de lui. Pour le moment il est dans son centre et c’est très bien, mais ils ne le garderont pas éternellement et ce qui est prévu par la suite, c’est un placement en IME, ce que je refuse catégoriquement ! A ce moment-là, il y aura des décisions à prendre : le reprendre à la maison avec l’aide d’une tierce personne, arrêter de travailler de nouveau pour m’occuper de lui ??? plein d’interrogations, que j’essaie d’occulter car ça me fait peur. Je continue de vivre au jour le jour sans me poser trop de questions et profiter de chaque moment avec lui, mais ça devient de plus en plus difficile. Mais comme on dit en Guyane : « Tchemberaid, pa moli ».