Il y a quelques jours, grâce à une amie commune, j’ai rencontré Isabelle Maisonnas, 43 ans, 3 enfants, fondatrice d’Addictive Pages, start-up d’édition numérique qui propose des séries à lire. Portrait d’une « jeune » créatrice d’entreprise.
Après des études à l’ESCP, Isabelle commence sa vie professionnelle au sein d’un cabinet de conseil en stratégie, CVA, dans lequel elle progresse rapidement. Durant ces 8 années, elle aura ses 2 premiers enfants. Puis elle suit son mari muté en Espagne, à Barcelone. « L’adaptation nous a pris 6 à 9 mois, mais ensuite nous avons beaucoup aimé et nous y sommes restés 6 ans ». Isabelle y a son 3ème enfant. Elle fait quelques missions et consacre du temps à ses enfants. Mais le manque d’activité professionnelle finit par lui peser. A leur retour à Paris, elle est embauchée par LEK Consulting, un cabinet spécialisé auprès des fonds d’investissements. Elle a en charge des missions rapides, où la pression est forte. « Je trouvais cela difficilement compatible avec 3 enfants ». On lui propose 4/5ème et des responsabilités RH en plus des missions mais elle n’est pas pleinement satisfaite. Elle décide alors de créer son propre job. « J’ai voulu mélanger mon goût pour l’action, la stratégie et mon intérêt pour l’écriture et les séries ! » Il y a quelques mois, elle lance avec Catherine Changeux, sa belle-sœur, Addictive Pages, une start up qui propose des séries littéraires numériques. » Les gens se sont habituées à la dynamique très rythmée des série TV. Nous avons voulu transposer à l’écrit les techniques scénaristiques de l’audiovisuel. Les gens ont envie de lecture agréable, légère, divertissante : je recherchais ces bulles de détente lorsque je travaillais beaucoup et que j’étais crevée le soir ! ». Elles se sont réparti les compétences : le développement de projet pour elle, l’édition et le marketing pour Catherine. Pour produire leurs séries littéraires, elles font appel à diverses compétences : scénaristiques d’abord pour travailler en amont les fondamentaux dramatiques de la série (la « bible »), de script-doctoring pour préparer les schémas narratifs, et de rédaction pour la production finale du texte.
Une série est déjà sortie : L’Ourlerie, se rapprochant d’une sitcom et la seconde, proche du soap, est quasiment prête. L’Ourlerie comporte 12 épisodes de 45 minutes de lecture chacune. Le premier épisode est gratuit, les suivants, publiés à un rythme hebdomadaire, coûtent 1,49 euros. La troisième série sera policière. « Nous voulons tester différents genres, comme cela se fait dans les séries TV ». Les séries peuvent être lues sur liseuse, tablette ou smartphones, dans les transports ou de chez soi. Une appli mobile Addictive Pages a également été développée sous Apple et Android. Les épisodes sont également disponibles chez les principales librairies en ligne.
Pour mener à bien ce projet, Isabelle a aussi appris à coder en format ePub et à devenir webmaster. Elle est incubée au Labo de l’Edition depuis mars dernier et bénéficie du soutien du réseau Paris Région Innovation Lab et de la BPI (bpifrance dont elle va recevoir une bourse de 30 000 euros).
Elle a également fait appel au réseau d’entraide féminin Mes bonnes copines pour tester un épisode. Les retours ont été très positifs et encourageants, avec 88% de taux de recommandation.
Ce qu’elle trouve le plus difficile dans la création d’entreprise, ce sont tous les aspects administratifs, souvent très compliqués. La TVA des auteurs est un sujet qui leur a demandé 9 mois pour se faire une religion. Aujourd’hui, la définition d’une politique de prix est un casse-tête entre les différentes normes de la Loi Lang et des gros distributeurs comme Amazon et Apple, bien entendu incohérentes entre elles.
En revanche, elle apprécie de gérer complètement son temps et de pouvoir « amortir » les périodes de voyage ou de rush de son mari, cadre dans une entreprise pharmaceutique. Mais cela ne veut pas dire moins travailler ! « Même si je segmente vie professionnelle et vie familiale, l’ordinateur est présent chez moi et je retravaille souvent de la maison ». Par ailleurs, elle reconnaît « se mettre beaucoup de pression » pour que tout se mette en place le plus vite possible. Elle se sent encore parfois tiraillée entre son travail et ses enfants. « Ce n’est pas toujours facile de faire des arbitrages entre me consacrer à mon business ou donner du temps à mes enfants, par exemple en les aidant dans leurs devoirs, c’est comme si j’avais un 4ème enfant qui lui aussi mérite toute mon attention ! ».
Merci pour ce témoignage.
Comme souvent devant un récit de reconversion ou de création de petite entreprise, je me demande si le revenu est équivalent à un salaire ?
Peut on se permettre cette aventure si le conjoint n’a pas lui un salaire conséquent ?
Ce serait bien de préciser systématiquement ce point.
nathalie
Je confirme que c’est addictif !
Marie
Très beau projet et beaucoup de courage avec une vie de famille si bien remplie !
Bastien