Avouez que cela faisait longtemps que je ne vous avais pas gratifiés d’un petit billet sur l’Education nationale… 🙂
La réforme des rythmes scolaires n’est donc plus seulement un projet mais une réalité pour environ 1/4 des écoliers français. Dont les miens (enfin, les deux qui sont en primaire).
Les médias se sont largement emparés du sujet, les reportages ont été nombreux, avec une tonalité dominante négative (organisation défaillante, sécurité des enfants pas toujours assurée, qualité des ateliers très discutable, fatigue des élèves, surtout des plus jeunes…).
Mon opinion tient en quelques mots et n’a pas beaucoup changé depuis ce billet en mai dernier où je disais ce que je pensais de la réforme. Dans l’école où sont mes enfants, l’organisation n’a pas été trop mauvaise, quelques couacs au début, mais rien de très grave. Sinon, je constate que mes enfants n’apprécient que très modérément ces ateliers (il semblerait qu’il y ait une grande différence entre l’énoncé des ateliers parfois alléchant et la réalité). Mais n’ayant pas assisté moi-même à l’un d’eux, je resterai prudente sur leur qualité réelle ou pas. Concernant la fatigue, oui, mes enfants préféraient dormir le mercredi matin. Oui, j’appréciais cette pause du mercredi (pas de devoirs à faire le mardi soir, possibilité de les coucher une demi-heure plus tard, etc.). Mais je pense que c’est une habitude à prendre pour tout le monde. Et puis, après 2 mois de vacances, ce n’est jamais facile pour les enfants de reprendre le rythme de l’école, donc, je ne suis pas sûre que l’argument « fatigue » quinze jours après la rentrée ait été très impartial. Mais je peux me tromper…
Bref, mes enfants ont deux fois par semaine des ateliers de 15h00 à 16h30 (enfin, si j’ai bien compris, il y a une grande récréation à 15h, donc cela doit plutôt être 15h30-16h30). Et le mercredi, ils vont à l’école de 8h30 à 11h30. Pour rappel, cette réforme visait à ré-introduire une matinée de cours supplémentaire (5 matinées, comme c’était le cas jusqu’en 2008, au lieu de 4) afin que les élèves, plus attentifs et dispos le matin, puissent apprendre mieux et davantage. Concernant cet objectif (prioritaire), j’estime qu’il est bien trop tôt pour juger. Cependant, j’ai quelques doutes, lorsque je vois des mercredis consacrés à une sortie poney et une autre matinée à la sortie piscine…(mais ne soyons pas mauvaise langue et attendons au moins une année scolaire pour juger et notamment, recueillir l’avis des enseignants par rapport à cet objectif là).
Mais surtout, j’estime que l’on parle beaucoup trop de ces ateliers et des rythmes…et pendant ce temps, on oublie l’école !! Parce que, rappelons-le, ces activités extra-scolaires ne relèvent pas de l’école mais des mairies. Et parce que non, les rythmes scolaires n’étaient pas l’un des principaux leviers de l’échec scolaire, contrairement à ce que dit l’entourage du Ministre de l’Education. De plus, cette réforme est en train d’être politisée (et je ne suis pas sûre que l’intérêt de l’enfant soit toujours au cœur de ces récupérations politiques…). Selon moi, là encore, revenons à un peu plus de bon sens. Si les mairies n’ont pas les moyens financiers et/ou humains de mettre en place des choses extraordinaires, faisons des choses plus simples, moins ambitieuses, mais plus efficaces. Et pourquoi ne pas utiliser ces créneaux horaires pour proposer un temps d’études de qualité, pour aider les enfants qui ont des difficultés dans telle ou telle matière ?
Par ailleurs, il semblerait que Vincent Peillon, après avoir commencé par des réformes non stratégiques (allonger de deux jours les vacances de la Toussaint, remettre la semaine des 4 jours et demi sans revoir la longueur des vacances d’été…) ait décidé de s’attaquer aux programmes de la maternelle à la classe de troisième. Un Conseil supérieur des programmes vient d’être mis en place. Là, le sujet m’intéresse vivement. Et qu’est-ce que je découvre en lisant ce billet de Brighelli ? Que ce conseil n’accueille aucun professeur en activité. Et là, forcément, je m’inquiète…et pas qu’un peu !
Pour être claire et concise, il y a une urgence : rétablir un enseignement de français de qualité en primaire. Le reste est important mais pas prioritaire. La priorité, c’est d’apprendre à lire et à écrire à nos enfants. Mais pas à écrire n’importe comment, avec des fautes d’orthographe tous les trois mots, sans ponctuation, sans concordance des temps, avec un vocabulaire pauvre… Pour qu’ils puissent lire, comprendre et aimer des textes littéraires, des œuvres classiques et contemporaines de qualité. Pour qu’ils puissent avoir une pensée structurée, rédiger des textes compréhensibles, construire des argumentations, être imaginatif (et pour cela il faut avoir du vocabulaire, connaître les règles de ponctuation, avoir étudié des textes, appris des poésies, etc.). Si, en plus, l’école parvient à offrir des activités artistiques, culturelles et sportives de qualité à nos enfants, très bien, mais ce n’est pas sa mission première. Donc je jugerai cette réforme en juin prochain non pas sur leurs connaissances en luth sauvage (véridique !), mais sur leur maîtrise des temps de conjugaison et leur compréhension de certaines règles d’orthographe. Oui, je sais, cela peut sembler moins amusant, moins créatif, moins « fun ». Mais je suis persuadée que la maîtrise de la langue française est une merveilleuse forme de liberté (et de pouvoir). Liberté de s’exprimer, d’écrire, de lire, de penser, de dialoguer…Cette liberté est précieuse, et pourtant, elle est empêchée tous les jours, sans que nos hommes et femmes politiques s’en émeuvent beaucoup, me semble-t-il…
Vos réactions sont les bienvenues ! N’hésitez pas à partager votre avis sur la réforme des rythmes scolaires et celle, qui arrive, des programmes…
j’ai lu aussi cet article sur le CSP (sans prof en exercice dedans)… et 18% des enfants qui entrent en 6ème sans avoir le niveau de lecture et d’écriture, ça laisse rêveur.
Cécile – 8alamaison
Votre prudence et votre circonspection vous honorent même si – pour ma part – je juge plus sévèrement ce qui ne relève non pas des difficultés inhérentes à la mise en place d’une nouvelle réforme mais témoigne d’un grave manque d’anticipation : les problème des locaux, le réveil des élèves de maternelle, l’impossibilité pratique de laisser aux enfants la liberté de choisir leurs activités pendant les temps d’activité périscolaires (contrairement aux intentions affichées), les référents adultes, les horaires et les lieux changeant sans cesse, l’absence de rythme journalier dans les communes comme Paris ayant choisi d’alterner 16h30 et 15h (sans respecter d’ailleurs le décret des rythmes scolaires). Cette réforme a peu de chance d’apporter une quelconque solution aux vrais problèmes de l’école. J’en veux pour preuve l’effritement des résultats de la France dans les comparaisons internationales entre 2000 et 2012, lequel s’observe pour des élèves de 15 ans n’ayant connu… que la semaine des quatre jours et demi dans le primaire !
Loys
@ Loys : j’aurais pu effectivement être beaucoup plus critique vis-à-vis de cette réforme et de sa mise en place mais je persiste à penser (à espérer, en tout cas) que la ré-introduction d’une cinquième matinée de cours est une bonne chose.
En revanche, je pense comme vous que la réforme des rythmes scolaires SEULE n’a aucune chance d’améliorer le système. Il faut qu’elle s’accompagne de nouvelles méthodes et de nouveaux programmes. Mais au moins, elle offre un cadre de travail plus « confortable » pour les enseignants. Enfin, c’est ce que disent les spécialistes du rythme de l’enfant…
Il serait intéressant de pouvoir comparer les résultats d’un élève de CM2 en français en 2008 et celui d’un enfant de CM2 en 2013 pour évaluer l’impact du passage à la semaine des 4 jours. Dispose-t-on de cela ?
Gaëlle
Pas sûr que ces rythmes apportent un « cadre plus confortable » aux enseignants qui se voient confisquer leur salle de classe pour les activités TAP. Fondamentalement je pense, comme vous (et presque tout le monde), qu’un retour à une semaine moins dense était souhaitable mais pas dans ces conditions malheureusement. Il n’y a plus d’évaluation d’entrée en 6e malheureusement. Une seule étude est parue récemment qui montre en 2011, soit trois ans après l’instauration de la semaine de quatre jours en 2008, que les élèves sortants de maternelle sont… mieux préparés pour entrer au CP !
Loys
Concernant les préconisations des chronobiologistes, si fondées soient-elles, difficile de dire qu’elles sont respectées par une réforme qui se concrétise par mille rythmes hebdomadaires divers et variés, au bon vouloir des communes (avec le résultat que l’on constate en maternelle). Le ministre a déclaré que, « qu’au-delà de quatre heures-quatre heures et demi [l’enfant] ne peut pas se concentrer » et les décrets interdisent plus de 5h30 de cours par jour. Or le lundi et le jeudi à Paris les élèves ont six heures de cours jusqu’à 16h30 ! Et le pire, c’est que les élèves les plus en difficulté continuent d’en avoir le mardi et le vendredi après 15h puisque les activités pédagogiques complémentaires (APC) ont lieu après les cours… Invoquer les rythmes de l’enfant pour en arriver à de telles aberrations, c’est se moquer du monde.
Loys