A comme Audace (par Corinne)
— De l’audace, il en faut pour sortir des sentiers battus que l’on veut nous faire prendre dès l’adolescence. Dans le monde scolaire d’abord, puis dans l’univers de l’entreprise, deux gigantesques machines à diluer les personnalités. Si l’on ne prend pas la peine d’aller plus loin, on pourrait croire qu’il n’y a pas de vie possible hors de ce schéma : scolarité, diplôme, salariat dans une grande structure. Pourtant, heureusement, d’autres voies existent, pour autant que l’on soit un peu plus audacieux que la moyenne et que l’on ait de la volonté.
— Cette audace, certains esprits positivement rebelles en font preuve dès l’adolescence. Ces personnalités ont souvent un projet de vie et une passion qui les amènent à prendre des décisions fortes. Ils doivent alors affronter leur famille, surtout s’ils souhaitent aller vers une voie qui n’a pas l’agrément ‘’intellectuel’’ de leurs parents. « Comment, tu veux être cuisinier ? Voyons, tu peux viser plus haut, non ? » / « Comment, tu veux entrer aux Beaux-Arts ? Apprends un vrai métier d’abord et continue le dessin comme un loisir…. » / « Comment, tu veux être kiné ? Voyons, fais au moins médecine ! ». Affligeant. Je ne m’étendrai pas sur ces réactions de géniteurs tellement obsédés par la réussite scolaire, sociale et financière qu’ils en oublient le plus important : l’épanouissement, seul critère de réussite valable à mes yeux. Pour ces jeunes, l’audace est nécessaire, voire vitale, afin d’être en mesure de résister aux diktats familiaux.
— Mais l’audace peut venir plus tard, avec la maturité, car tout le monde n’a pas une vision claire de ses aspirations et de son potentiel avant 30 ou 40 ans. Ce sont ces personnes-là dont je raconte l’itinéraire sur mon blog, Les Nouveaux Audacieux. Elles ont souvent suivi la voie tracée pour elles par leurs parents, ou bien ont fait des études par hasard ou par défaut, tout simplement, en l’absence de réelle vocation. Pendant des années, elles ont laissé mûrir leur personnalité, leurs envies, leurs talents. Un jour, à 32, 43 ou 51 ans, la certitude est là : elles savent enfin ce qu’elles veulent faire, et surtout ce qu’elles ne veulent plus faire. Elles ressentent aussi souvent le besoin de concilier différemment vie privée et vie professionnelle, de redéfinir leurs priorités, de réaménager leur temps pour mieux en profiter, car les années passent et modifient le regard que l’on porte sur les choses. Alors elles prennent la tangente et décident de tout changer, sous le regard souvent médusé, parfois envieux, de ceux qui continueront ad vitam à se plaindre de leur vie sans jamais rien tenter.
— De l’audace, les candidats à la reconversion vont en avoir sacrément besoin, pour agir malgré les oiseaux de mauvais augure, pour reprendre des études en cumulant souvent leur job et leur formation, pour tout recommencer à zéro dans une nouvelle branche où ils n’ont souvent aucun réseau. De l’audace, il en faut aussi dans notre société où la reconversion est peu prisée et souvent suspecte (« il/elle est instable, ne sait pas ce qu’il/elle veut »), où un CV de reconverti(e) fait généralement peur aux recruteurs alors qu’il devrait, en toute logique, se trouver sur le haut de la pile tant est forte la motivation qui anime ces profils atypiques. De l’audace, il en faut également pour présenter son nouveau projet de vie à ses proches, toujours inquiets, voire affolés (surtout les parents) par l’inconnu, pour remporter l’adhésion de son conjoint, de ses enfants, de ses amis afin qu’ils soient présents pendant la phase de reconversion. De l’audace, il en faut enfin pour changer de statut social et gérer la baisse de niveau de vie qui peut s’ensuivre, avec son lot de conséquences.
— Curieusement, dans tous les parcours qui me sont racontés, cette audace tient souvent à la seule décision. Une fois que celle-ci est prise, le doute s’évapore, les Nouveaux Audacieux ne tergiversent pas et sont tendus vers leur objectif, quelles que soient les circonstances et même si celles-ci sont parfois difficiles, notamment au niveau personnel. Cette ténacité, cette pugnacité, cet optimisme, ces formidables démonstrations de volonté font du bien. Car si rien n’est simple dans ces reconversions, tout est en revanche porteur d’envie, d’énergie et d’espoir. A comme Audace donc, mais aussi comme Alternative, Aventure, Appétit, Aspiration… Et maintenant, à qui le tour ?
Corinne Martin-Rozès est journaliste d’entreprise indépendante et maman de trois ados. Elle a créé et anime deux blogs : http://lesnouveauxaudacieux.com/et www.versaillesinmypocket.com.
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